Villetaneuse

Le  « Tremplin J.Duclos » – Villetaneuse

Propos : A partir de ce mi- lieu aquatique – bassin de vie, vie écoulée, où les os s’égouttent, entre ciel qui fuit et sol carrelé serré : surface plane, reflets déformés. Médium.

Médium : ce registre de la voix (des voix perçues)

Médium : ce qui nous permet de communiquer avec l’invisible, l’en-deçà, l’au-delà, disparus.

La piscine, fermée, bardée de zinc s’offre, après intrusion, comme sas onirique, matrice étonnante, réservoir de mémoires anciennes, dernières, peuplée d’innombrables mélopées, bruissements, chants à bouches closes, ou seraient-ce des larmes ? Reflets captifs à relevés. Ce mi- lieu, idéalement situé entre Hôtel de ville, place des Partages, université, frôlé par des flux de publics hétérogènes, récemment éteint, s’enfonce, en une apnée, déjà, profonde. Avant qu’une construction neuve d’une piscine commune n’existe, nécessaire soyons à l’écouté : qu’est-ce que « ça » nous dit ?

Et donc, avant que ne s’abattent cloisons et mise à blanc : des propositions (sous-tendues par la première note sur le travail de mémoire, refondateur, et la conviction, vérifiée ailleurs, que chaque être, d’où qu’il soit, enferme en lui la prodigieuse capacité de créer de nouvelles langues, y compris poétiques). Osons inverser le rapport aux « mass-médias » qui instrumentalisent, rendent passif, consommateurs et dépendants, en faisant jouer la surface comme support écran, médium réinventé ou se reflétera, par séquences des moments, mouvements, de cet inconscient collectif – le nôtre ? ici et maintenant ? celui d’un peuple ? d’une nation ? d’une Citoyenneté ? « Ça nous parle !», des évocations (notées, bribes, fragments) se recomposent en partition commune…c’est ce que nous entendrons réellement.

Eaux surprises, capturées, en une journée par l’œil de la caméra pour relever des instants, qui pourront se lire dans la durée.

Ce que nous avons « vu » (ceux que nous avons re-connus, pour avoir longuement travaillé sur les temps forts des commémorations – Déportation, 8 mai 1945, l’Abolition de l’esclavage, 17 octobre 61 ou encore la grande guerre 14/18 -).

Dans cette eau assombrie, à succession d’étroites meurtrières horizontales, ajourant cette touffeur angoissante suggère une sensation, être prisonnier dans un énorme bateau immobile ; happé par la puissance de l’image, qui entraîne l’âme, le psychisme, maintient à fond de cale…bateau fantôme négrier… et « l’image » pourra être déclinée, et les textes, possiblement élaborés avec l’association ACIA, enregistrés, univers sonore en écho à cet univers autre visuel.

Dans cette autre partie du bassin, là, vu de haut (le drone passe et ses ailes provoquent à la surface, même remous que ceux provoqués par l’hélicoptère) : des taches brunes, verdâtres ; on cherche à déceler des corps, toujours – il semble que des linges informes flottent et s’abîment – dans ce qui se présente comme possible fleuve ( et l’image, subliminale, retravaillée fera surgir d’autres formes encore, à la dérive, ombres errantes qui une certaine nuit d’octobre 61 se défirent… se sont elles qui se feront entendre par le truchement du collectif maghrébin).

Cette autre encore : qui dit le rivage, le rapport entre le sol et cet élément liquide, vecteur des débarquements (Normandie et Provence). Préfiguration d’une capitulation (et la « flotte » se matérialisera… et l’eau, rougira, peut-être avant de devenir lumière intense, eaux brûlées de flammes résistantes.

Le lieu, unique, sensible à la moindre variation de lumière (les nuages obscurcissent les verrières elles non occultées, du haut suffoquent l’espace ; quelques temps après, le soleil réapparut, redessine à longs traits d’autres architectures fictives… Inépuisables sont les interprétations.

De la réflexion sur l’eau polluée, combat de la municipalité « autour des sanitaires », en faveur d’un habitat social (l’eau souillée de la Seine, souillée par les hôpitaux qui, encore, il y a deux siècles, fut un motif fort de revendication, énoncé dans les cahiers de doléances de 1789). Oui, il fallait arrêter de déverser toutes sortes d’ordures dans les eaux de la Seine ou des milliers de parisiens venaient se servir en eau, pollution qui entraînait des quantités de maladies – revendications, combats… jusqu’à arriver à ces disques, ronds, ronds dans l’eau, la syncope se fait plus insistante, soudain, s’accélère !, disques tournoyants qui renverraient à cette histoire particulière de Villetaneuse, le combat des salarié(e)s de Vogue autour de la production de microsillons. Et nous pourrions entendre la voix des anciens, hommes, femmes, syndicalistes, politiques qui menèrent la lutte.

Et demain ? est-ce le double de cet « Aquarius » bateau désarmé, qui sauva en méditerranée des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants, aujourd’hui, empêché, qui s’ankylose, persiste, perdure ici (car le problème de la migration, de l’eau comme lieu de passage, tous les passages, transitoire de nos vie, humaine, se pose, se posera de plus en plus pressent).

Et demain ? encore : cette eau, claire, d’apparence « potable » sera-t-elle enjeu ? pour d’autres peuples ? rareté de cette eau par ces temps de grande sécheresse, qui s’annoncent. En ce bassin de rétention craquelé.

Nous voyons bien, qu’à partir de cette inépuisable réserve d’images, nous pouvons faire remonter des mémoires et nous projeter sur ce miroir, nouvel écran trans-lucide. En un projet évolutif dont les paramètres pourraient se modifier à la demande de la municipalité.

Concordance des temps : tempo nouveau.

Des passés, simples, composés, imparfaits, de ces mémoires, souvenir entêtant, aphones, ou hérissés de cris de joie, pris dans cette eau lourde, histoire commune dans laquelle nous trempons, qui que nous soyons… eaux futurs (les étudiants de l’université regardent, en ce moment même une série de dessins, corps robotisés, et la pince de cet autre robot, mure, jusqu’aux limites du cadre, disparaissant, derrière le dispositif visuel qu’elle a « monté »… concordance des temps. Comment harmoniser des temps qui ne seraient plus à contre-temps ; conjuguer aux présents, car ou sont les corps ? qui cohabitent ? qui coexistent dans ce morceau de territoire : les familles, enfants, adolescents sont disponibles après la classe, le week-end ; les étudiants, leurs enseignants, entre 12h et 14h, absents car absorbés dans la projection de leur propre devenir.

Si nous voulons que l’irrigation advienne entre l’université, ses lieux de présentations et la ville « Villetaneuse », peut-être serait-il souhaitable que ces « éclats » (vidéo et installation sonore) soient mobile, prétexte à échanges, conférences, interventions jouées pour histoires autrement écrites.

Afin que ce travail puisse être mis en œuvre, une structure (type Algeco un peu grand) pourrait servir de sas de création – réunion – lieu d’enregistrement, avant de passer à l’inscription de ce qui aurait été produit dans l’espace – partie droite du bâtiment (sans accès aux bassins bien sur condamnés), les écrans pourraient être installés dans les cinq caissons mosaïque existant, le sol débarrassé à minima de tout obstacle ; cet environnement singulier étant préservé ; des « visites » seraient instituées à dates fixe dans le bâtiment, devenu un autre catégorie de lieu culturel, étonnant, porteur encore de sa propre histoire, de mémoires collectives, de problématiques universelles…réceptacle d’une autre manière de voir.

Premières ébauches

Tracés préliminaires : à propos d’une ville. Villetaneuse, commune dont l’histoire (son développement économique, social, territorial, universitaire) s’est inventée, gagnée, de haute lutte, pugnacité jamais démentie, de combats en contacts, politiques, souvent gagnés, quelque fois perdus, ou négociés ; exemplaire dans ses stratégies collectives, toujours, force motrice, entrainant les habitants, habitantes, pris, engagés dans des processus de libération, d’émancipation (de conquêtes). Cette commune tient bon : fait front et face. Preuves à l’appui (urbaines, notamment, logements sociaux, espaces verts, structures municipales).

Invente des alliances, afin que les « conditions » de vie, conditions humaines soient améliorées, sans cesse. Au service de l’intérêt général. Plus value : une cohésion (des luttes soutenues), une cohérence de projet (comment aider ? ajouter un démultiplicateur culturel ?).

Broyés… : que ce soient les écorces de chêne, il y a très longtemps qui donnèrent le tan, de Ville-taneuse, rendant imputrescible (incorruptible !? les peaux, le cuir…

Que ce soit le gypse, devenant ainsi de pierre, plâtre, après passage au feu, extrait des carrières, premiers matériaux de constructions.

Que ce soit l’ardoise, en poudre, mêlée à de la gomme-laque, qui donnera matière, après pression, à ce nouveau support : le disque (les entreprises Nobel, Vogue)

…en-grandissant, depuis cette géographie singulière, et grâce à des techniciens pointues, la ville connut un rayonnement inter-national (les entreprises s’adaptent, produit des masques à gaz, pour allemands, français, américains, pendant la deuxième guerre mondiale, « made in Villetaneuse » ; les vinyles, gravés ici, font entendre neufs accords de jazz…au monde).

Et aujourd’hui, l’université. En son sein, des ingénieurs, réfléchissent, et plus encore, à la production de nouveaux plastics anti-rejet, pour les greffes. Des « poupards » en série à de nouveaux corps, sauvés.

Vocation internationale…de pôle d’excellence (la concurrence est rude). Mais la ville et son poids d’habitants « originaires » (on nommait ainsi les Alsaciens, puis les personnes venues d’une même région…aujourd’hui régions du monde) a souci de réparer, nous semble-t-il, les ruptures entre ces deux mouvements : centrifuge, qui s’ouvre sur l’extérieur, en grand, et centripète…qui pourrait avoir envie de se resserrer (de s’abstraire même) …se soustrayant, tant bien que mal aux pressions – entre autres financières, insoutenables.

Peut-être serait-il envisageable, de puiser dans le récit national ; ponctué de forts mouvements, collectifs, revendiquant, à des moments précis ; ébranlé par d’irrésistibles poussées. Le récit, irrigué par ces mille et un désirs de liberté… d’égalité… de fraternité, serait comme repris : où sont les nœuds, dans la trame ? qui se défirent ?…

Repérés : révolution française, abolition de l’esclavage, victoire contre l’occupation nazie, guerres d’indépendance de terres colonisées. Retrouvant des raisons de construire, donc d’espérer, d’espérer donc de construire : il faudra sans doute tourner et retourner dans tous les sens des matériaux historiques, pour la plupart inconnues ou déformés.

Notre Histoire est commune, faite de « progrès » arrachés à la force de bras de fer. Le dé-tachement de certains d’entre nous, pourrait mettre en jeu, dangereusement, notre démocratie.

Avant d’aller plus loin dans l’écriture, il nous faut écouter la première magistrate, et ses services, et ses conseillers, arpenter le territoire, ausculter la « piscine » ; interroger les archives municipales, connaître le tissu associatif et économique ; repérer des points d’ancrage, dans la faculté et inventer conjointement des « actes » marqueurs, de l’Histoire, des histoires de la commune, afin de donner le désire de vouloir des possibles, rarement acquis définitivement.

Plus urgent que jamais, à l’heure où des fascismes, des droites extrêmes, en-armées, en Europe et plus loin, mais aujourd’hui trop proche, resurgissent et hurlent à la mort de l’Autre, du Différent.

Les traductions artistiques, seraient proposées, dans un deuxième temps, et passées au crible, leur faisabilité.

Premières ébauches

Tracés préliminaires : à propos d’une ville. Villetaneuse, commune dont l’histoire (son développement économique, social, territorial, universitaire) s’est inventée, gagnée, de haute lutte, pugnacité jamais démentie, de combats en contacts, politiques, souvent gagnés, quelque fois perdus, ou négociés ; exemplaire dans ses stratégies collectives, toujours, force motrice, entrainant les habitants, habitantes, pris, engagés dans des processus de libération, d’émancipation (de conquêtes). Cette commune tient bon : fait front et face. Preuves à l’appui (urbaines, notamment, logements sociaux, espaces verts, structures municipales).

Invente des alliances, afin que les « conditions » de vie, conditions humaines soient améliorées, sans cesse. Au service de l’intérêt général. Plus value : une cohésion (des luttes soutenues), une cohérence de projet (comment aider ? ajouter un démultiplicateur culturel ?).

Broyés… : que ce soient les écorces de chêne, il y a très longtemps qui donnèrent le tan, de Ville-taneuse, rendant imputrescible (incorruptible !? les peaux, le cuir…

Que ce soit le gypse, devenant ainsi de pierre, plâtre, après passage au feu, extrait des carrières, premiers matériaux de constructions.

Que ce soit l’ardoise, en poudre, mêlée à de la gomme-laque, qui donnera matière, après pression, à ce nouveau support : le disque (les entreprises Nobel, Vogue)

…en-grandissant, depuis cette géographie singulière, et grâce à des techniciens pointues, la ville connut un rayonnement inter-national (les entreprises s’adaptent, produit des masques à gaz, pour allemands, français, américains, pendant la deuxième guerre mondiale, « made in Villetaneuse » ; les vinyles, gravés ici, font entendre neufs accords de jazz…au monde).

Et aujourd’hui, l’université. En son sein, des ingénieurs, réfléchissent, et plus encore, à la production de nouveaux plastics anti-rejet, pour les greffes. Des « poupards » en série à de nouveaux corps, sauvés.

Vocation internationale…de pôle d’excellence (la concurrence est rude). Mais la ville et son poids d’habitants « originaires » (on nommait ainsi les Alsaciens, puis les personnes venues d’une même région…aujourd’hui régions du monde) a souci de réparer, nous semble-t-il, les ruptures entre ces deux mouvements : centrifuge, qui s’ouvre sur l’extérieur, en grand, et centripète…qui pourrait avoir envie de se resserrer (de s’abstraire même) …se soustrayant, tant bien que mal aux pressions – entre autres financières, insoutenables.

Peut-être serait-il envisageable, de puiser dans le récit national ; ponctué de forts mouvements, collectifs, revendiquant, à des moments précis ; ébranlé par d’irrésistibles poussées. Le récit, irrigué par ces mille et un désirs de liberté… d’égalité… de fraternité, serait comme repris : où sont les nœuds, dans la trame ? qui se défirent ?…

Repérés : révolution française, abolition de l’esclavage, victoire contre l’occupation nazie, guerres d’indépendance de terres colonisées. Retrouvant des raisons de construire, donc d’espérer, d’espérer donc de construire : il faudra sans doute tourner et retourner dans tous les sens des matériaux historiques, pour la plupart inconnues ou déformés.

Notre Histoire est commune, faite de « progrès » arrachés à la force de bras de fer. Le dé-tachement de certains d’entre nous, pourrait mettre en jeu, dangereusement, notre démocratie.

Avant d’aller plus loin dans l’écriture, il nous faut écouter la première magistrate, et ses services, et ses conseillers, arpenter le territoire, ausculter la « piscine » ; interroger les archives municipales, connaître le tissu associatif et économique ; repérer des points d’ancrage, dans la faculté et inventer conjointement des « actes » marqueurs, de l’Histoire, des histoires de la commune, afin de donner le désire de vouloir des possibles, rarement acquis définitivement.

Plus urgent que jamais, à l’heure où des fascismes, des droites extrêmes, en-armées, en Europe et plus loin, mais aujourd’hui trop proche, resurgissent et hurlent à la mort de l’Autre, du Différent.

Les traductions artistiques, seraient proposées, dans un deuxième temps, et passées au crible, leur faisabilité.


Commentaires

Laisser un commentaire